Le camp

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Résister

Le contrôle et la répression sur une partie indésirable ou suspecte de la population est la raison d’être du camp du Vernet d’Ariège. À ce titre, l’organisation du camp vise à éviter la réunion et la structuration de cellules de résistance, à mater les rébellions et à couper les internés de l’extérieur. Malgré cela, différentes formes de résistance parviennent à prendre forme et plusieurs organisations, notamment communistes, parviennent à se structurer et planifier des actions.

La révolte du 26 février 1941 est un exemple de soulèvement. L’état sanitaire général est absolument catastrophique. Le « Collectif International » parvient à mobiliser les quartiers B et C contre les brutalités et la famine dont les détenus sont victimes. Les révoltés refusent de travailler et neutralisent les gardes. Sur ordre du préfet de l’Ariège, les forces de l’ordre donnent l’assaut. Elles opèrent 102 arrestations conduisant à la prison les principaux meneurs, d’autres étant livrés aux Allemands ou envoyés en déportation, notamment dans le camp de concentration de Djelfa en Algérie.

Camp de Djelfa, 1942 ©Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, 100W133

On trouve un autre exemple de rébellion dans le récit Jules de Friedrich Wolf qui décrit la révolte pacifique du 1er mai 1940 lors de laquelle les internés célèbrent, fleur à la main et poing levé, cette date hautement symbolique.

Enfin, la résistance par l’art est un sujet qui ne cesse d’émerveiller, tant les artistes ont su, tout au long des périodes d’internement et dans les conditions les plus indicibles, utiliser toutes les ressources à leur portée pour peindre, dessiner, composer, écrire, sculpter et inventer.

Cosmopolites, exposés à la répression par leur notoriété et leurs publications, souvent proches de milieux politiques opposés aux extrémismes de droite, les artistes et les intellectuels font partie des premiers à fuir les régimes autoritaires et les totalitarismes pour se réfugier sur le sol français dans les années 1930. Internés au Vernet pour leurs idées, leurs engagements, leur nationalité, ils trouvent une place pour la culture et l’art dans le quotidien concentrationnaire. Œuvres hyper réalistes, croquis sur le vif, caricatures, tous les sujets inspirent.

©Coll. Amicale du camp de concentration du Vernet d’Ariège.

Outre les créations graphiques, la présence de journalistes et d’écrivains a donné naissance à de précieux témoignages (Arthur Koestler, La lie de la terre, Sándor Garaï, Réflexion sur le temps, Friedrich Wolf, Jules, Max Aub, Carnet de Djelfa…).

L’administration du camp, qui redoute plus que tout l’oisiveté et les rebellions qu’elle entraîne, ne cherche pas à décourager ces occupations : théâtre, conférences, concerts, lectures de poèmes…

Pièce de théâtre. Camp du Vernet d’Ariège. ©Ville de Pamiers.

Il y a environ 220 chanteurs groupés dans les différents chœurs. Ils répètent depuis des mois et ont atteint un niveau artistique très élevé. Le chœur russe (la majorité de mes collaborateurs sont des Russes, avec lesquels je vis maintenant en grande amitié), a incontestablement une très grande valeur artistique et je n’aurais pas la moindre hésitation à les présenter à la salle Pleyel. Ces chanteurs chantent avec tant de foi que leur âme semble affleurer dans les yeux illuminés. Souvent le quartier A (condamnés de droit commun) (sous toutes les réserves !), vient les écouter.

Sandor Garaï, 30 avril 1940